Raison et sentiments
sont joués par deux soeurs, Elinor et Marianne Dashwood. Elinor représente la
raison, Marianne le sentiment. La raison a raison de l'imprudence du sentiment,
que la trahison du beau et lâche Willoughby, dernier séducteur du XVIIIè
siècle, rendra raisonnable à la fin. Mais que Marianne est belle quand elle
tombe dans les collines, un jour de pluie et de vent.
Revenons un peu sur un roman qui m’a dépaysée et m’a fait
prendre mon temps après une déception livresque !
Raison et Sentiments
nous emporte auprès de deux sœurs : Elinor et Marianne Dashwood, que tout
oppose dans le caractère. Elinor est posée, réfléchie, et incarne la raison,
tandis que Marianne se laisse aller à ses penchants, ses émotions, et
représente donc les sentiments. Toutes deux sont en âge de se marier, mais
leurs inclinaisons à toutes deux pourraient bien souffrir des difficultés
insoupçonnées…
J’ai craqué pour l’édition collector de ce roman, qui me
permet de découvrir un autre récit d’une auteur que j’aime beaucoup. Bien sûr,
je n’avais lu qu’Orgueil et Préjugés
avant, mais Jane Austen m’avait marquée par la vivacité de son style, par l’histoire
prenante et par tout, en fait. C’est encore le cas ici !
Dans cette histoire qui suit les codes et le rythme de la
société britannique du 19ème siècle, nous suivons l’évolution des
amours des sœurs Dashwood, au cœur de leur vie quotidienne et mondaine. Il ne
faut pas ici s’attendre à ce que tout aille vite, bien au contraire, mais une
fois que nous avons réussi à nous couler dans le moule de l’époque, on se
laisse porter par la plume dynamique de Jane Austen, et on se met à côtoyer
avec plus ou moins de sympathie plusieurs personnages.
Elinor et Marianne sont bien entendu les protagonistes du
récit, et si elles m’ont toutes deux plu, j’avoue avoir une préférence pour la
première, qui est aussi l’aînée. Je me suis plus retrouvée en elle, dans cette
femme qui intériorise énormément mais n’en ressent pas moins que Marianne, qui,
elle, a de plus fortes expressions. Cela étant, les deux vont souffrir de leurs
propres caractères et des conséquences que cela engendre. À ne rien montrer, on
peut envoyer des signaux contradictoires, et à tout montrer ou presque, on
prend des risques que nous n’avions pas imaginés. Ces deux femmes sont
fascinantes, notamment aussi par tout ce qui les lie : leur amour
fraternel est touchant de bien des façons.
D’autres personnages gravitent autour d’elle, les
prétendants (dont je tairai les noms), leur mère, leur frère et leur belle-sœur,
leurs amis… toute une société, en vérité. Bien sûr, aucun d’eux ne peut nous
laisser indifférent : Jane Austen joue trop bien avec sa plume et les
lecteurs que nous sommes pour cela ! Laissez-moi d’ailleurs vous dire qu’il
y a des baffes et des secouades qui se perdent, dans ce vaste monde de la
littérature. Oui, même dans les classiques ! (surtout dans les classiques. Il n’y a qu’à lire Autant en emporte le vent, pour s’en
rendre compte. Bref.)
Dans toute cette fresque humaine, on retrouve de tout, mais
surtout on retrouve un méli-mélo de réactions aux évènements tout à fait
fascinant. Rien qu’Elinor et Marianne offrent deux tableaux vraiment intéressants
face au même élément. Il y a vraiment une richesse du récit, de la psychologie
de chacun, qui rend ce récit terriblement réaliste et prenant malgré son rythme
ralenti.
Attention, je ne dis pas qu’il y a des longueurs. Je dis que
chaque chose va comme ça allait à l’époque : ce n’est pas un roman qu’on
dévore comme on dévorerait une romance contemporaine. Il se savoure ! On
suit les personnages, en s’impliquant tout de même un peu, et on observe ce qui
se passe. Ceci est le grand talent de Jane Austen : installer le lecteur
devant son histoire et la lui partager pour qu’il oublie le monde, même si tout
ne va pas aussi vite qu’on en a l’habitude.
En elle-même, l’histoire est tout à fait intéressante :
les évènements qui interfèrent dans les souhaits et les prévisions des jeunes
femmes (et de leurs entourages, souvent) rendent le tout savoureux et « l’aventure »
assez croustillante. De fait, les rebondissements sont assez recherchés et
correspondent à des remous assez puissants pour l’époque. Mais nous, on aime !
Que vous dire de plus ? Il est difficile d’en dire trop
sur ce roman qui possède cependant énormément de qualités. Ce n’est pas un
bouquin dont on peut énumérer tous les points positifs comme ça, c’est un roman
qui s’apprécie sur l’instant, et bien après. On en goûte la richesse encore
longtemps ! La plume de Jane Austen est vive, précise, et elle sait
parfaitement cerner les caractères de ses personnages avec des mots ajustés. On
s’y voit, on est dedans et ça fait un bien fou !
Autre chose qui fait du bien dans cette lecture : les
valeurs. Avec Elinor qui fait prôner sa raison avant toute chose, mais aussi et
surtout beaucoup de générosité et de douceur, de miséricorde et de sensibilité
à l’autre, il y a déjà de quoi faire. Mais si on ajoute Marianne, qui malgré
ses sentiments qui peuvent la renfermer sur elle, ajoute une toute de vie et de
joie au récit, en plus d’une véritable évolution vers la maturité ? Je n’aurai
bientôt plus assez de place pour terminer ma chronique ! Ces deux sœurs démontrent
chacune à leur façon une force de caractère que nous aimerions tous posséder !
En fin de compte, Raison
et Sentiments aura été une très, très chouette découverte pour moi. C’était
totalement différent d’Orgueil et
Préjugés, et j’en suis bien heureuse, parce que comme ça, la comparaison ne
s’effectue pas. Elinor et Marianne sont deux sœurs fascinantes, opposées mais
auxquelles on s’attache très vite, et on prend part à leur histoire. Jane
Austen possède une plume très vive, qui sait croquer des situations et des
personnages en quelques mots avec habileté et justesse, peignant une intrigue
aux remous surprenants, mais… qu’on ne peut qu’apprécier !
Ce sera donc un 17/20
pour moi et je vous recommande chaudement ce classique !
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