jeudi 4 août 2016

L'extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea (Romain Puértolas)

IKEA. Ou comment un banal et innocent mot de quatre lettres, prononcé à mi-voix dans un taxi à Roissy Charles de Gaulle, peut vite devenir le début d’une rocambolesque et hilarante aventure. De la crise européenne au régime post-Kadhafiste libyen, un voyage inattendu, riche en quiproquos et rebondissements, ballotera, dans une armoire, un arnaqueur professionnel sur le chemin de la rédemption et de l’amour.

Après avoir si intelligemment oublié ma lecture en cours à Bourg-en-Bresse en revenant des JMJ, je me suis résignée à passer à un autre roman (sans trop de difficultés, je l’avoue). J’ai donc choisi un bouquin qui m’avait l’air rapide à lire et sans prise de tête. Je ne me suis pas trompée !

L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea (quel titre !) est un petit roman qui retrace le parcours de cet Indien charlatan qui va se retrouver enfermé dans une armoire et transbahuté contre son gré dans plusieurs pays. Son trajet non désiré va lui apprendre de nombreuses choses sur la vie et va surtout lui donner envie d’effectuer un grand virage dans son existence : il veut devenir un homme bien, lui qui a toujours escroqué les autres.

Pour tout vous dire, quand j’ai acheté ce livre à la brocante de la kermesse de ma paroisse, je n’ai lu que le titre. Surprise garantie ou pas, puisque tout était résumé dans ces quelques mots. Pourtant, j’ai réussi à être surprise, puisque je ne m’attendais pas à autre chose que du cocasse, et s’il y en avait, il faut admettre qu’il y a aussi bien plus que cela.

Ajatashatru Lavash Patel (eh, de mémoire, s’il vous plaît !) s’est lancé dans un périple vers un Ikea français pour obtenir un lit à clous, qu’il compte bien revendre en revenant en Inde dans son petit village. Depuis qu’il est fakir, Ajatashatru trompe tout le monde et jusqu’à présent, cela ne lui avait posé aucun problème. Sauf qu’il va rencontrer Marie, chez Ikea. Et qu’ensuite, ce sera un groupe de Soudanais alors qu’il est enfermé dans son armoire. Et une actrice au cœur sur la main. Bref, une succession de rencontres toutes plus improbables les unes que les autres va lui provoquer des chocs au cœur et lui donner envie de devenir meilleur.

Ce roman aborde l’image qu’on a de soi, notre conscience, mais aussi des traumatismes violents que l’on peut expérimenter durant son enfance. Autant pour les aspects de reconstruction, de changement de cap, je trouve que Romain Puértolas a très bien su trouver les mots, autant pour les traumatismes il est passé de façon très banale dessus et cela ne m’a pas paru très approprié. C’était presque trop léger, mais il est vrai que ce n’est pas non plus un mal, puisque cela renforce l’horreur que cela peut représenter. C’est aussi une manière de confronter les cultures, totalement différentes entre l’Orient et l’Occident !

En dehors de ça, l’intrigue se joue sur plusieurs pays, plusieurs transferts et l’auteur nous livre l’ensemble avec un joli florilège de sarcasmes et de remarques amusantes. On sent qu’il a beaucoup de remarques à faire sur la société, et s’il les livre avec beaucoup de légèreté, elles n’en paraissent pas moins directes et topent des sujets actuels. Il est à noter de même que Romain Puértolas fait usage de bons nombres de clichés et de stéréotypes répandus, notamment sur les Gitans, sur les services de l’immigration et tant d’autres points. L’histoire reste parfois en surface, tout en pêchant des points forts et francs de ces personnages ou situations, comme s’il voulait les dénoncer.

En vérité, on dirait bien que ce roman, non seulement invite son lecteur à réfléchir et à prendre pour exemple l’histoire assez banale d’un homme qui change de cap dans sa vie, au travers d’un extraordinaire voyage très alambiqué et très improbable mais sympathique à lire ; mais dénonce aussi beaucoup de traits de nos sociétés actuelles. Les conditions inhumaines de l’immigration, les clandestins, donc, sont ceux qui me reviennent en premier lieu. Au travers de la firme Ikea, l’auteur rejoint aussi plusieurs principes actuels de consommation à grande échelle, vus par un homme qui n’y est pas du tout habitué… ce qui a tout de rafraîchissant !

Enfin, concernant l’intrigue en elle-même… je l’ai dit, je la trouve sympathique, improbable et alambiquée. C’est un peu comme si on avait essayé de balancer de la poudre de perlimpinpin avec une dose de « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? ». On suit le tout avec amusement, on trouve la fin mignonne et un peu cucul la praline, on se dit plusieurs fois que franchement, l’auteur a poussé le truc assez loin pour que le voyage continue, mais ça reste assez réaliste quand même ! Bien pensé, donc !

En conclusion, L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea a été une lecture rapide et assez sympathique. J’ai apprécié de me balader de façon incongrue auprès de ce charlatan qui décide de changer le cap de sa vie, entreprend un périple non désiré et récolte des fruits qui résonneront chez beaucoup de lecteurs. Le ton frais et clairement humoristique de la narration est assez sympathique aussi, même si parfois on flirte avec le trop, juste avant. On y dénonce beaucoup de sujets, on en aborde certains avec trop de légèreté pour moi, mais c’est peut-être un effet voulu par l’auteur, histoire de percuter encore plus son lecteur. Bref, il y a de nombreuses qualités à ce roman, auquel j’attribue un 15/20 !

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