Ada naît dans les
années 1930 à Cradock House, demeure de la famille Harrington. Fille illégitime
de la domestique noire, elle grandit aux côtés des deux enfants du couple. Elle
ne va pas à l'école, mais Cathleen Harrington, la maîtresse de maison, lui
apprend à lire. Remarquant son intérêt pour la musique, cette dernière entreprend
de lui enseigner le piano, en dépit des réserves de son entourage. Ada a beau
s'avérer une élève assidue et une pianiste très douée, ses perspectives
d'avenir semblent cependant bien limitées dans un pays où la situation entre
Blancs et Noirs se durcit de plus en plus. L'année de ses dix-huit ans, alors
que la politique de l'apartheid est mise en place sur l'ensemble du territoire,
Ada est violée par Mr Harrington. Enceinte, elle se réfugie chez sa tante, dans
un township. Son talent pour la musique et l'amitié qu'elle partage avec Mrs
Harrington vont se révéler ses meilleurs alliés dans un monde où, mère d'une
enfant métisse, elle n'a nulle part sa place.
Bon, avant que je ne sois encore plus en retard dans mes
chroniques, il est temps de me pencher sur une jolie découverte !
Une chanson pour Ada est
l’histoire d’Ada (on s’en doutera), une enfant née à Cradock House, en Afrique
du Sud. Avec sa mère, elles servent les maîtres de la maison, qui les
considèrent pourtant en majorité comme des membres de la famille. Pour autant,
la différence entre Noirs et Blancs est déjà là, et même si Ada veut croire de
toutes ses forces que cela n’aura pas d’impact dans ses relations avec eux,
elle se rendra compte au fil des années qu’il en est tout autrement… Mais l’amour,
l’amitié et l’espoir sont permis. Alors que l’apartheid prend corps, c’est l’histoire
d’une fillette, puis femme, qui aime intensément la musique et ses proches, que
nous allons découvrir.
Volontairement, mon résumé en dit beaucoup moins que la
quatrième de couverture. La raison en est simple : je me suis spoilée
toute seule l’histoire en relisant ces mots, alors que j’avais dépassé les 100
pages dans le roman. Un résumé qui en dit plus qu’après ce stade en dit trop
pour moi, même si l’histoire d’Ada est en effet bien plus complexe que cela.
Bref.
Le roman m’avait intriguée par sa belle couverture et par la
promesse de la découverte d’un pays que je ne connais que très peu. L’Afrique
du Sud est une contrée dont j’ai entendu parler un peu en cours, un peu grâce à
Nelson Mandela, comme beaucoup d’entre nous. Sinon, c’est un peu le vide, et
comme je suis curieuse, j’ai voulu essayer. Grand bien m’en a pris, parce que
ce bouquin est une perle, avec une histoire peu évidente mais très entraînante
à sa manière !
Lorsque le récit commence, Ada est toute jeune, et comme c’est
elle la narratrice, les phrases sont simples, les incompréhensions parfois nombreuses,
et cela évolue au fil des pages. On remarque toujours que cette enfant est un
peu… inconsciente, quelque part, et c’est normal : c’est le manque d’éducation
qui se fait sentir. Pour autant, Ada a une grande connaissance du cœur, et elle
est très observatrice, très humble… c’est un personnage d’une grande richesse
et d’une grande humanité que l’on apprécie beaucoup de suivre.
On se lie vite avec tout l’entourage de notre héroïne :
Madame Harrington, Mr Phil, la mère d’Ada, Lindiwe quand elle survient…
beaucoup évoluent autour d’elle, en fonction de ses périodes de sa vie.
Attention, tous n’attirent pas forcément notre sympathie, comme Monsieur
Harrington, toujours distant, ou Miss Rose. J’ai eu du mal avec la tante d’Ada,
aussi. La mosaïque des caractères présentée est très riche et très variée,
exactement comme les fresques humaines que nous formons tous les jours, avec
cependant des contextes radicalement différents.
L’histoire d’Ada est compliquée : elle mêle un désir d’appartenance
fort avec des gens qui n’ont pas la même couleur de peau, mais qui parfois
partagent ses sentiments et essaient de faire d’elle un membre à part entière
de leur cercle. Ada va néanmoins vivre des évènements particulièrement
difficiles, tout en assumant la charge que cela impose. On ne peut que l’admirer
et rester rivé au bouquin, alors qu’au fond de nous, l’empathie est là, et qu’on
ne peut rester indifférent à ce qui se produit pour elle.
Avec ce roman, le dépaysement est total. Les impressions par
rapport au climat, aux conditions de vie, aux échos historiques dans d’autres parties
du monde… c’est vraiment comme si le lecteur était en Afrique du Sud et
observait avec Ada ce monde si étrange qui change d’un seul coup, prend une
direction inattendue. Avec nos repères européens, on apprend à lire tout ceci
avec un autre recul, à voir les choses autrement, et j’apprécie beaucoup le
changement de perspective. Sans compter que les descriptions des lieux m’ont
donné l’impression d’y être !
On sent réellement un travail de recherche et de composition
de la part de l’auteur : elle le précise d’ailleurs à la fin de son roman,
dans les remerciements. Chaque détail semble pensé, peaufiné, pour assurer un
voyage en douceur mais avec de solides bases au lecteur. Sans parler de la
musique ! Soyons clairs, je déteste le classique, mais j’aime le piano et
voir toutes ces références aux morceaux de divers compositeurs m’a beaucoup
plu. Cela offrait aussi une autre dimension riche et originale à ce bouquin
déjà bien dense.
Au niveau de la plume, Barbara Mutch a su offrir à son
lectorat une plume évolutive. Elle a fait d’Ada sa narratrice, depuis sa plus
tendre enfance jusqu’à la fin de sa vie. À chaque page, le style reste le même,
en s’imprégnant des leçons apprises. Les phrases deviennent plus affirmées, les
doutes ou les certitudes s’installent… cette plume est assez impressionnante,
en fait. Très douce et envoûtante, je suis assez charmée !
Quant aux valeurs, je pense qu’on peut en dire beaucoup. La
première est cette notion de différences entre Noirs et Blancs, qui nous paraît
incongrue, violente et contre laquelle nous avons envie de nous soulever. La
notion de justice apparaît clairement, d’égalité, de fraternité et surtout d’humanité.
Ada est souvent obligée de choisir son camp, et c’est celui de l’amour qu’elle
prend. L’amour de sa fille, de ses proches, notamment. On apprend le pouvoir
des idées, le pouvoir de la musique, en bref, le pouvoir de chacun. L’amour est
présent, l’espoir aussi, et c’est ce qui fait de ce roman un beau rayon de
soleil malgré les épreuves auxquelles nous assistons.
En conclusion, Une
chanson pour Ada est un superbe roman qui m’aura transportée en Afrique du
Sud, auprès d’une femme qui aura vécu une vie parfois difficile, mais qui a
aimé et espéré toute sa vie. Le contexte culturel et géographique est
fascinant, Ada est une héroïne forte et pourtant avec des défauts, humaine, en
somme, que beaucoup devraient apprécier. Elle m’a en tout cas beaucoup touchée,
et j’ai passé un excellent moment de lecture en sa compagnie ! Les valeurs
véhiculées sont belles…
Enfin bref, je vous le conseille largement et ce sera un 18/20 pour moi !
L'histoire a l'air émouvante et le contexte original. Je n'ai jamais rien lu sur cette période. Les livres qui s'étalent sur toute une vie ont souvent une dimension particulière. Ils font ressentir plus que les autres le poids du temps sur les êtres. Et perso, ça me donne du courage de voir tout ce qu'on peut surmonter au cours d'une vie. Je sais pas si je le lirai un jour parce qu'il y a souvent dans les livres sur la ségrégation des scènes assez humiliantes qui me mettent super mal à l'aise, mais si un jour, je me sens de lire sur le sujet, je pense que ce bouquin fera l'affaire.
RépondreSupprimer