"Ch. b. à tt f.
pour petit ménage, logée, sach. cuisiner." Saffie a vingt ans. Elle est
allemande. À peine arrivée à Paris, elle répond à l'annonce du jeune musicien,
Raphaël. Celui-là même qui lui ouvre la porte et qui reste médusé devant ces yeux
de silence et cette présence-absence de la jeune femme. Amoureux, oui, déjà. Il
lui propose le mariage quelques semaines plus tard. Elle accepte comme elle le
fait de tout le reste : passivement. Son mutisme sec, pierreux, ne s'ébranle
pas même à la naissance de leur fils. Il faut attendre LA rencontre, avec
András, le luthier. Lui sait dialoguer avec le silence. En elle alors tombe la
peur, comme une pluie ; se lève l'amour, comme le soleil... et fond le secret.
Honnêtement, même quelques heures après avoir terminé ma
lecture, je ne sais pas trop quoi penser de ce roman. Il m’a à la fois pas mal
imprégnée et laissée sur le carreau !
Saffie est une jeune allemande fraîchement arrivée sur
Paris, lorsqu’elle répond à l’annonce de Raphaël Lepage et que celui-ci en
tombe immédiatement amoureux, l’engageant dans la foulée. Saffie semble à la
fois présente et tellement loin, absente… et c’est ce silence, cette gravité
qui font chavirer le cœur du musicien. Ils vont se marier rapidement, avoir un
enfant… mais Saffie n’est pas heureuse, elle se contente de survivre. Jusqu’à
ce que son chemin croise celui d’András, luthier et hongrois d’origine. Là, l’amour
éclate, et Saffie reprend pieds dans la vie, mais pas sans souffrances.
Il m’est difficile de faire un résumé un peu plus personnel
de l’histoire que j’ai lu en cette fin de semaine. Pas parce que j’ai eu du mal
à la comprendre, ni rien, au contraire ! Mais parce que j’en reste encore
un peu troublée. Ce roman m’a surprise, impressionnée, et m’a un peu dégoûtée,
aussi, je crois.
Dès le départ, on remarque que la plume de Nancy Huston joue
sur les mots, sur les sonorités, ce qui est très agréable : elle essaie de
nous imprégner d’une façon différente pour que son intrigue nous pénètre par
ses bizarreries, ces tempos que l’on capte ou que l’on loupe. Il y a à la fois
une musicalité étrange et une littérarité, si vous me permettez le terme, assez
innovante.
C’est de cette façon qu’elle nous entraîne dans les années
50 françaises, après la Deuxième Guerre Mondiale, au milieu de ces conflits
concernant l’Algérie, qui rythment la vie et semblent pourtant si loin de nos
personnages. C’est ainsi que l’on rencontre Saffie, qui semble être actrice de
sa propre vie. Elle agit, subit, même l’amour de Raphaël… et c’en est difficile
à traverser pour nous : comment peut-elle rester si passive ? Qu’a-t-elle
donc ? Elle ne peut pas faire ça, non ? Si ?
Son personnage est complexe et j’avoue avoir à la fois été
un peu fascinée par elle, et surtout effrayée. J’essayais de comprendre, et
lorsque la vérité apparaissait, si cela ne me choquait pas, ça ne restait pas
très loin. Ce n’était pas tant son passé qui m’inquiétait, mais bien ce qu’elle
faisait de son présent.
Parce que L’empreinte
de l’ange, c’est ça, pour moi : l’histoire d’une femme qui va
reprendre son présent en mains, pas forcément facilement, mais avec amour… sans
imaginer une seule seconde que ses actes pourraient avoir des conséquences. Ben
oui ! Comment ça, elle va à ses rendez-vous avec son amant, son fils dans
le landau, puis dans la poussette ? Comment ça, Emil (son fils, donc), va
finir par appeler András « Apu », ce qui signifie Papa en hongrois ?
Comment ça, cette liaison va durer plusieurs années ? Hein ? Mais c’est horrible !
Et pourtant… et pourtant, cette histoire n’accuse personne. Elle
franchit les murs de n’importe quelle barrière, expliquant par le contexte de l’époque
quelles sont les tensions qui peuvent agiter les membres de certaines
communautés, pousser à la révolution, ou… alors enclencher une certaine
passivité. Après lecture de ce roman, je ne peux accuser aucun personnage, et
pourtant, je suis loin de les avoir cautionnés. J’ai imaginé au travers des
lignes de Nancy Huston ce qui se passait en eux, et même si parfois, c’était
trop pour moi… je comprends, quelque part.
La fin m’a profondément ébranlée parce qu’elle survient sur
un dénouement inattendu, choquant et injuste. Il est douloureux, alors que la
plume de Nancy Huston glisse sur un ton presque doux pour nous transmettre
toute la puissance des actes, de ce qui survient. C’est là que j’ai été véritablement
dégoûtée, en fait. En apprenant certaines choses sur la guerre d’Algérie, sur
les mouvements de l’époque, sans parler le comportement des deux amants, là… je
trouvais ça déjà parfois difficile. Mais là… ça m’a coupé le sifflet !
Vous êtes sûrement en train de vous dire que franchement, cette
lecture, vous allez vous faire un plaisir de l’ignorer, si vous ne l’avez pas
encore lue. Je peux comprendre, sincèrement ! Pourtant, c’est un roman qui
vaut le coup pour cette musicalité et cette plume que j’ai évoquées plus haut, sans
compter l’intrigue qui vous prend un peu au piège. Je regrette juste de m’être
sentie un peu à côté parfois, parce que j’avais envie de savoir comment ça
allait se terminer. Je dirais juste qu’entre ces pages se cache beaucoup d’humanité
(dans ses bons et ses mauvais côtés), de violence, de réalisme, d’amour (même
physique et j’avoue que je m’en serais passée) et de musicalité. C’est un
mélange de beaucoup, beaucoup de choses.
En fin de compte, L’empreinte
de l’ange est un roman particulier que je n’aurais jamais lu si on ne me l’avait
pas prêté. Il m’aura pas mal perturbée, surtout au niveau de l’intrigue et des
éléments que j’aurais appris sur notre histoire. La fin m’aura ébranlée par sa
soudaineté ainsi que son caractère tranchant, injuste. Cela étant, j’ai pu
constater que Nancy Huston avait une plume de talent, sachant faire passer une
multitude d’éléments entre ses lignes, ses mots, et en ceci, c’était une très
bonne découverte.
Ce sera donc un 14/20
pour moi !
Et bien, en voilà un mitigé.. Je te comprend tout à fait en tout cas, je crois que j'aurais eu le même ressenti si je l'avais lu ^^ ...
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