En Chine ancienne,
l'empire se morcelle. Les princes annexent les états comme le ver à soie dévore
les feuilles du mûrier. Les astrologues prophétisent la fin des temps. La Mort
qui tremble quand toute vie est menacée dépêche son Envoyé. L'entité envahit
l'âme d'un jeune prêtre. Partageant sa conscience, elle le force à rechercher
une incroyable magie curative. Dans un des Royaumes combattants, un souverain
agonise. Son décès obligera sa fille guerrière au mariage. Révoltée, elle fait
enlever le religieux. Que sont réellement les huit émissaires écarlates du dieu
Zargose, identiques telles des gouttes d'eau, qui fouillent l'âme comme le
tisonnier la braise pour raviver les pensées cachées ? Dans le royaume de Zhang
Zhung, pour quelle raison la jeune « Premier oracle » du monastère de Jiu Gonpa
se réveille-t-elle terrorisée ?
Voici une chronique qui promet d’être assez difficile à
rédiger. Non pas que je n’ai pas apprécié le livre, mais parce qu’il me reste
une impression de n’avoir pas tout saisi, et que cela s’avère profondément
dérangeant.
Le Cycle des
Monarchies de l’Ombre nous embarque en Chine ancienne, dans laquelle des
forces obscures tentent de s’emparer du pouvoir. La magie et les coutumes de l’époque
se mêlent donc pour créer un ensemble de fantasy sombre. Le premier opus nous
décrit la formation de l’Envoyé des Monarchies, un homme dont les actes vont
avoir des incidences notables pour le futur et la lutte qui s’est engagée. Par
la suite, le lecteur sera amené à contempler comment Zargose tâche de prendre
le pouvoir parmi les humains, et comment il essaie de conquérir sa promise…
Ce résumé est bien peu par rapport à tout ce que vous
trouvez dans le roman. Il faut dire que le bouquin fait plus de 450 pages,
écrit raisonnablement petit, donc ça représente pas mal de contenu. L’intrigue
est très riche, très développée, et semble aller beaucoup plus loin que ce que
le lecteur découvre entre les pages.
Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, en commençant ce
roman. La couverture est intrigante, le résumé me parlait bien, et comme vous
le savez (ou pas), je suis de nature curieuse. J’ai très vite remarqué que la
plume était très soignée, presque professorale, et que l’histoire dans laquelle
je m’engouffrais ne souffrait d’aucun détail inutile ou oublié. Chaque chose avait
son importance et sa place. De fait, j’ai rapidement compris que j’allais
devoir me concentrer pour tout saisir.
C’est là que ça va moins bien : je pense que je ne me
suis pas assez concentrée, que je n’ai pas pris assez de moments pour lire au
calme afin de saisir toutes les subtilités du roman. L’intrigue principale m’a
embarquée, parce qu’elle est assez retorse et que je suis généralement partie
prenante du « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ».
En soi, je me demandais où Olivier Lusetti voulait m’emmener, et je voulais
savoir où j’allais atterrir en fin de compte. Pour ça, je ne suis pas déçue du
voyage. Je regrette juste de n’avoir pas complètement compris la fin, sûrement
à cause d’une fatigue qui a du mal à s’en aller.
Pour autant, il est indéniable que nous avons ici à faire à
un récit de qualité. Je n’avais encore jamais lu de livre ayant trait à la
Chine ancienne, et j’avoue que j’ai beaucoup aimé cette plongée dans ce
contexte, que j’ai seulement entrevu sur écran. On y découvre des pensées de l’époque,
un système politique, des coutumes intéressantes, et si en plus vous ajoutez un
côté magique qui est très présent dans la première partie, ça vous donne un
ensemble remarquable. Je reste admirative de la façon dont Olivier Lusetti a su
mêler son imaginaire au côté historique.
Concernant les personnages, ils s’avèrent nombreux. On peut
cependant rapidement s’attacher à Yingfù, que l’on suit durant tout le premier
tome sur un chemin difficile d’apprentissage. J’ai cependant apprécié sa détermination,
son humilité et sa douceur. Il reste humain et ses faiblesses nous le rendent
plus proche, alors que son intelligence et sa ressource provoquent notre
admiration. Il en va de même pour des personnages comme Vivpière, qui, elle,
est plus entière, plus tranchante. Pour autant, elle reste elle aussi humaine,
et lorsqu’elle se dévoile dans les différentes parties où on la retrouve, elle
devient attachante aussi. J’ai eu plus de mal avec Bourcrane, en revanche. Ça s’est
un peu amélioré sur la fin, mais peu.
Les « méchants » de l’histoire nous marquent assez
vivement, je dois le dire. C’est assez effrayant, comme menace, et cela fait
partie d’une réalité au départ assez abstraite, mais qui tend à devenir
concrète. Et ça, on a peine à l’imaginer, et pourtant, c’est décrit
relativement bien et comme réaliste. Je n’aimerais pas qu’un truc pareil pèse
sur notre monde avec tant de force que dans ce bouquin !
Au niveau de la plume, comme je l’ai dit plus haut, elle est
très maîtrisée. Elle ressort très professorale, tâchant de guider son lecteur
au mieux, dans une intrigue et un monde qui n’ont rien d’aisé et qui pourraient
facilement perdre celui qui s’y plongerait. Ne parlons pas des dialogues, qui
laissent percer l’opacité de la pensée orientale pour les occidentaux que nous
sommes (il faut parfois relire, parce que ce n’est pas exactement le même mode
d’expression que nous). Je lui reproche toutefois à certains moments trop de
détails crus (merci, mais la description d’un viol n’apporte pour moi pas
grand-chose à l’histoire, navrée), et un manque de rythme qui parfois s’avérait
difficile à soutenir. Enfin, ce n’est pas vraiment un reproche, plus un constat
du fait que j’ai eu parfois du mal à me replonger dans l’histoire malgré sa
richesse indéniable.
Enfin, si je dois m’arrêter sur les valeurs, il est clair qu’on
parle d’une forme de lutte entre le Bien et le Mal. Yingfù répète souvent aussi
de sages paroles sur le libre arbitre et sur les conséquences de ses choix. Cela
nous fait prendre conscience que nous avons tous un rôle à jouer, des
responsabilités à assumer, peu importe le contexte ou l’époque dans laquelle
nous vivons. On croise aussi de nombreuses reprises des phrases philosophiques
qui pourraient devenir des citations plutôt chouettes, en soi. Il reste que
chacun a le pouvoir de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre et que
nous pouvons tous changer, il faut s’en donner la peine.
En conclusion, Le
Cycle des Monarchies de l’Ombre a été une lecture intéressante. C’est un
récit très riche, au rythme parfois assez lent, mais qui reste fascinant. Pour un
peu que le lecteur s’accroche, il verra s’ouvrir les portes d’un monde qui mêle
de nombreux détails de la Chine ancienne avec un imaginaire poussé. Rien n’est
laissé au hasard et la réflexion m’apparaît à l’ordre du jour. L’ampleur de l’intrigue
se dévoile au fil des pages, portée par des personnages emblématiques mais qui
restent humains. Si je n’ai pas très bien saisi la fin, sûrement à cause de la
fatigue, cela reste un récit que je peux conseiller aux amateurs de fantasy,
parce qu’il est assez original et qu’on sent un véritable travail dans sa
conception et sa rédaction.
Ce sera donc un 16/20
pour moi !
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